Victoire totale pour l’opposition vénézuélienne. La majorité qualifiée au parlement leur donne quasiment les pleins pouvoirs face à l’exécutif.
Le Conseil national électoral (CNE) vénézuélien a annoncé mardi que la coalition anti chaviste avait remporté la majorité des deux tiers des sièges au parlement lors des élections législatives de dimanche dernier. C’est un véritable séisme politique pour le Venezuela comme pour l’ensemble de l’Amérique latine. Sur les 167 députés, 109 appartiennent à la MUD, 3 sont des indigènes de partis régionaux alliés à la MUD et 55 sont chavistes.
Uns seule défaite chaviste depuis 1999
Si l’opposition espérait emporter la majorité absolue des sièges, elle n’osait pas imaginer obtenir la majorité qualifiée des deux tiers. La victoire de l’opposition lors des législatives de dimanche dernier au Venezuela avait déjà constitué une première. Mais obtenir la majorité qualifiée est inespéré.
Devant l’ampleur de la défaite, le président vénézuélien a demandé, mardi lors de son émission télévisée hebdomadaire, à ses ministres de démissionner afin de procéder à une «restructuration» du gouvernement.
Depuis l’arrivée au pouvoir d’Hugo Chavez en 1999, le chavisme n’avait enregistré qu’une seule défaite: lors du referendum constitutionnel du 2007. Si lors des législatives de 2010, l’opposition avait légèrement devancé, en nombre absolu de voix, le PSUV (Parti socialiste unifié du Venezuela) ce dernier avait conservé la majorité des sièges au parlement.
Mais la confirmation par le CNE de la majorité qualifiée pour la MUD ouvre des perspectives que même les plus optimistes des opposants au président Nicolas Maduro n’osaient espérer. Une majorité absolue pour l’opposition aurait laissé le président Nicolas Maduro de grandes marges de manœuvre conformément à la constitution. Cela aurait rendu la cohabitation compliqué et provoquait de tensions fortes entre l’exécutif et l’assemblée.
Avec la majorité qualifiée pour la MUD, c’est Nicolas Maduro qui ne disposera plus d’aucune marge de manœuvre. C’est jusqu’à son sort personnel qui sera entre les mains de la majorité anti chaviste du parlement.
En effet selon la constitution, la majorité qualifiée permet d’exercer un vrai pouvoir sur l’exécutif et sur le pouvoir judiciaire. La nouvelle majorité parlementaire pourra bloquer les «leyes habilitantes» qui permettent au président de la république de gouverner par décret et de contourner le pouvoir législatif. Elle pourra prendre l’initiative des lois qu’elle votera. Elle pourra engager des procédures de destitutions contre les ministres. Elle sera en mesure de proposer des réformes constitutionnelles. Elle pourra enfin révoquer et nommer les membres du Tribunal suprême de justice, le procureur général, le défenseur du peuple, et les membres du Conseil nationale électorale. Elle pourra aussi décidé de la tenue d’un referendum révocatoire à l’encontre du président vénézuélien, Nicolas Maduro, véritable épée de Damoclès qui menacera en permanence le successeur d’Hugo Chavez.
Après des années d’impuissance, la coalition anti chaviste réunie au sein de la MUD a obtenu quasi tous les pouvoirs, réduisant le président Nicolas Maduro au rôle de potiche à la merci de la majorité parlementaire.
«Je défendrai par tous les moyens la révolution bolivarienne»
Le président vénézuélien, Nicolas Maduro
Pour l’instant les autorités chavistes semblent accepter la défaite. Presque aucune déclaration officielle n’a été faite depuis la publication des résultats. Ni le président Nicolas Maduro, ni le président de l’Assemblée nationale, Diosdado Cabello, ne sont sortis de leur mutisme depuis lundi matin. Il faut se référer à leurs déclarations avant le scrutin pour analyser leurs intentions. «Je défendrai par tous les moyens la révolution bolivarienne», a déclaré Nicolas Maduro. Mais ses moyens constitutionnels sont réduits aujourd’hui à la plus simple expression.
Si l’opposition disait craindre des réactions de l’armée dont la hiérarchie a été largement «chavisée», aucun signe n’est venu de là jusqu’à aujourd’hui. Il est pourtant difficile d’imaginer que l’ensemble des chavistes acceptent sans rien tenter leur écrasante défaite. «La révolution doit continuer» se contentent-ils d’affirmer.
De son côté l’opposition, au-delà de satisfaction d’avoir gagné, semble presque sidérée par les perspectives qui s’ouvrent à elle. Et si elle a enfin réussi à s’unir pour battre le PSUV, il lui reste à montrer son unité pour élaborer et appliquer un programme qui réponde aux principales attentes des Vénézuéliens: la fin des pénuries, la lutte contre l’insécurité, la lutte contre l’inflation et le rétablissement de la valeur du bolivar, la monnaie vénézuélienne.
(Source : LeFigaro.fr)